Monday, January 1, 2018

Pas assez riche, la pâtisserie française ?

(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)

Nous voilà donc entrés en 2013, l’année au nombre porte-bonheur – ou malheur, nous verrons bien. Vus la crise et les premiers mois laborieux du nouveau gouvernement, nous pouvons hélas nous attendre économiquement à une année bien plus difficile. « Nous » ? Non, pas nous tous, je vous rassure. Pour certains, et pas forcément ceux auxquels on pense en premier, la crise n’existe pas.

Je parlerai économiquement de nos chers – très chers – élus. Leur galette n’a jamais été aussi beurrée et leur nombre va toujours croissant grâce au mille-feuille qu’ils entretiennent grassement, malgré les nouvelles technologies qui auraient dû simplifier et réduire les coûts de l’administration. Non, pour eux la crème déborde pendant que pour « nous », les miettes se font de plus en plus rares.

Car il convient de rappeler quelques chiffres, facilement vérifiables. Nous avons la chance unique de financer 577 députés et 343 sénateurs (par comparaison, les USA – plus de 300 millions d’habitants – sont maigres de 535 députés et 100 sénateurs !). Une vie d’impôts de G.Depardieu ne suffit pas pour payer un an de leurs indemnités. N’est-il pas extraordinaire de financer avec largesse ces gens qui ne rêvent que de nous imposer toujours plus, croquant dans notre part de gâteau déjà bien entamé ?

Mais les parlementaires ne sont que la couche sucrée du mille-feuille. Il y a ensuite l’état et sa pièce montée d’une multitude d’agences opaques débordantes de gras. Puis toute la cascade chocolatée de collectivités aux objectifs incertains, mais qui toujours croquent leurs financiers en ces temps pourtant difficiles. Pas moins de 2 040 conseillers régionaux et 4 042 conseillers généraux. Oublions les 78 députés européens, qui ne sont qu’une fine tranche caramélisée à côté de la pâte épaisse que constituent les 519 417 conseillers municipaux et 36 635 maires. En 2007, nos impôts ont ainsi sucré les élus communaux pour plus d’un milliard d’euros. Et l’indi(gente)gestion est pour nous, bien sûr.

La création bureaucratique est enfin spécialement expressive via le florilège de communautés intercommunales et de syndicats– avec leur propre galette bien sûr – aux besoins les plus obscurs : plus de 36 000, soit près de 40% des communes en Europe, là où l’Allemagne n’en a que 12 196.

Ces chiffres sont à ramener à deux autres. Tout d’abord, selon l’INSEE, au 1er janvier 2011, notre pays comptait 65 027 000 habitants. On possède aujourd’hui en France, environ un mandat électoral pour 108 habitants. Si la démocratie se mesurait à l’aune du nombre d’élus, notre pays serait un modèle universel aussi apprécié que la pâtisserie française ! Un autre chiffre, plus inquiétant encore, celui du budget de l’état : pour 2013, le total des recettes est à 312 milliards d’euros, à comparer à 1,5 milliard environ de coûts des élus. La gabegie colossale de l’indemnisation des élus inutiles mais bien nourris ne serait donc que la cerise sur le gâteau : 0,5% du budget ! Mille feuilles dans la poche.

Notre pays possède ainsi le mille-feuille le plus épais du monde assurant une galette dorée au plus grand nombre d’élus et à une bureaucratie à l’utilité douteuse. Comptons les couches : Europe, Etat, régions, départements, communautés de communes, communes, syndicats, agences : voilà bien un machin dont nous n’avons aucune raison d’être fiers vu ses résultats tant économiques que sociaux.

En fait, la France a recréé l’organisation féodale que la révolution avait balayée : si la noblesse est maintenant élue et le clergé s’est transformé en administration, le tiers Etat est resté le larbin qui se doit d’alimenter les deux autres tiers, et qui malgré la « grande bouffe », ne sont jamais rassasiés.

L’état protecteur des droits est devenu l’état spoliateur avide d’argent qui n’a de cesse de presser comme des citrons les citoyens qui n’en peuvent plus : le gâteau sucré a pris un goût d’amertume !

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